Discours d’Eloy Martinez président de l’Association pour le Souvenir de l’Exil Républicain Espagnol en France (ASEREF) lors de l’hommage au Maquis Bir-Hakeim devant la stèle honorant les résistants FTP et FFI à l’occasion de la cérémonie de la libération de Montpellier le 29 août 2021
Monsieur Michael Delafosse Maire de Montpellier et Président de la Métropole
Madame la Conseillère Régionale représentant la Présidente de la Région Occitanie
Monsieur le Vice-Président du Conseil Départemental représentant le Président du Conseil Départemental de l’Hérault
Mesdames et messieurs représentants les autorités civiles et militaires
Mesdames, messieurs,
Merci Monsieur le maire de nous avoir convié à cette cérémonie afin de rappeler le rôle des républicains espagnols dans la résistance. Je veux profiter de cette occasion pour dire combien nous apprécions votre récente décision d’accueillir à Montpellier des réfugiés d’afghans. En février 1939 Montpellier accueillait des centaines de réfugiés espagnols. Le 10 février 800 femmes et enfants trouvaient refuge dans l’usine désaffectée Villodève et les hôpitaux montpelliérains soignaient des dizaines de blessés et malades républicains espagnols, les organismes d’entraide et de solidarité à Montpellier furent alors très actifs.
Cette tradition française d’accueil est un bien inestimable souvent mis à mal.
Merci de porter haut cette exigence.
Il s’agit donc aujourd’hui de rendre hommage aux républicains espagnols engagés dans la résistance en France. Rappelons rapidement quelques dates
14 avril 1931, le peuple espagnol se dotait démocratiquement d’une seconde République.
18 juillet 1936, un coup d’Etat du général Franco soutenu par Hitler et Mussolini essaie de renverser la jeune République espagnole. La guerre va durer trois années. Ce sera le prologue dramatique de la seconde guerre mondiale.
Plusieurs vagues de réfugiés arriveront en France entre 1936 et 1939.
En février 1939, après la chute de Barcelone 500 000 réfugiés républicains espagnols civils et militaires traversaient les Pyrénées. Le gouvernement de la troisième République va enfermer plus de 200 000 d’entre eux dans des camps de concentration notamment sur les plages du Roussillon et aussi sur l’ensemble du territoire et en Afrique du Nord.
Les espagnols qui luttèrent en Espagne pour la paix, la liberté et la justice vont poursuivre leur combat ensuite dans la Résistance et dans les Forces Françaises Libres, notamment avec le général Leclerc. Ils vont participer à la libération des principales villes du Pays dont Paris avec les FFi et aussi dans la deuxième DB avec la fameuse « Nueve ». A Montpellier, Toulouse, Foix, Nîmes ils seront de tous les combats… des milliers furent déportés à Mauthausen, dès 1940 près de 1000 d’entre eux étaient livrés aux allemands par le gouvernement de collaboration basé à Vichy.
Dans le Gard, le combat de la madeleine reste comme un des plus connus de la libération de notre région
Des dizaines et des dizaines de combats, d’embuscades témoignent de leur engagement et de leur haute conscience politique et la dimension humaine de ces guérilléros.
Selon des documents officiels de l’état-major national FFI les actions menées en France par les guérilléros ont été les suivantes :
Ponts détruits 150
Locomotives détériorées 80
Lignes électriques sabotées 600
Attaques sur des usines 20
Sabotages importants dans des mines de charbon 22
Combats livrés 512
Prisonniers ennemis 9800
Ennemis tués 3000
Le colonel français Serge Ravanel ex chef des FFI de la région de Toulouse témoignait « valeureux parmi les plus valeureux résistants ils ont su se sacrifier avec héroïsme et courage, de plus nos résistants français qui se confrontaient à la nécessité de la lutte sous forme de guérilla pour laquelle ils n’étaient pas préparés trouvaient avec les camarades espagnols une expérience inestimable. Nos camarades, poursuit Ravanel, ont acquis durant la guerre d’Espagne les connaissances que nous autres ne possédions pas : ils savaient fabriquer des bombes avec des explosifs artisanaux, ils savaient tendre des embuscades, ils connaissaient à fond la technique de la guérilla, c’était pour nous des frères de combat. A la libération en les voyant défiler nous nous demandions : mais quand pourront-ils rejoindre leur patrie ? Quand pourront-ils vraiment fêter cette liberté pour laquelle ils ont tant lutté à nos côtés ? Que va faire la nation française pour les aider répondant ainsi à l’aide tant généreuse qu’ils nous ont apporté ? »
Dans l’Hérault :
Regroupés souvent dans des compagnies de travailleurs étrangers, comme à Clermont l’Hérault, les espagnols étaient très actifs, ils menèrent une forte campagne contre le travail obligatoire. Ils eurent à subir une répression féroce qui coûta la vie à nombre d’entre eux autant à Montpellier qu’à Béziers où sévissait le policier Marty.
Fin 1943, Galvez fut détaché de la brigade de guérilléros de l’Aude et fut envoyé dans l’Hérault par la direction de la résistance espagnole afin de constituer les premiers groupes armés qui devaient composer la 11ème brigade.
En début d’année des groupes se créèrent à Pézenas, Clermont l’Hérault et à Bédarieux.
Une fois ces bases établies, le commandement fut confié à Luis Bermejo qui établira d’étroits contacts avec des officiers appartenant l’Armée Secrète, à Pézenas, contribuant au succès des opérations d’envois aériens.
Le groupe de Clermont l’Hérault était composé dans sa quasi-totalité par les espagnols encadrés militairement dans une compagnie de travailleurs, c’est-à-dire officiellement « légale ».
Dans cette compagnie à part le commandement qui était français, les espagnols occupaient tous les postes dans les bureaux (incorporations, signature des contrats avec les employeurs, etc.).
Les fausses cartes d’identité abondaient parmi les espagnols, les guérilléros allaient et venaient ainsi plus facilement du fait que les papiers étaient en règle.
Ce n’était pas un cas isolé c’était ainsi dans la plupart des compagnies de travail qui servirent souvent de base pour développer des groupes de guérilléros en France.
Les employés de la compagnie de Clermont l’Hérault attaquèrent une nuit le dépôt de celle-ci emportant chaussures, vêtements, vivres qui devaient servir à aider le maquis souvent dépourvu de l’essentiel et qui était stationné dans les exploitations forestières ou autour.
Les espagnols de l’Hérault prirent contact avec un détachement du commandant Léon ancien des brigades internationales, de nationalité polonaise. Dans ce groupe il y avait aussi beaucoup d’espagnols.
Le détachement était en contact avec le commandement FTPF basé à Lodève.
De nombreuses actions furent menées :
En mars 1944 furent détruits 14 postes de haute tension près de Montpellier et à Graissessac fut partiellement détruit le pont sur la route de Millau à Béziers.
An avril sabotage de la voie ferrée entre Agde et Vias, aussi à Saint-Jean de Védas et au Sud de Bédarieux.
En juillet le pont de la route de Millau fut entièrement détruit au cours d’une embuscade contre un détachement allemand.
Si les guérilléros devaient déplorer la mort de l’un d’entre eux et trois blessés, les allemands laissèrent sur le terrain avant de se disperser 43 morts et plusieurs blessés.
Le 4 août réception d’envois aériens en collaboration avec les français, ce qui procura aux guérilléros un abondant matériel de guerre.
A partir du 20 août la quasi-totalité des forces espagnoles participèrent aux combats pour la libération de Montpellier au cours des quels six guérilléros furent blessés.
Béziers, Saint-Pons et d’autres localités furent libérés avec la participation des espagnols aux côtés des français.
Les résistants républicains espagnols, les guérilléros, méritent aujourd’hui que la France reconnaissance véritablement leur rôle dans la libération du pays. Ici à Montpellier aujourd’hui un bout de chemin est accompli.
Je voudrais citer avant de terminer, trois personnes, il y en eu beaucoup d’autres : Robert Euvrard alias capitaine Vincent, un ancien des brigades internationales qui s’engagea auprès des républicains espagnols en 1937 à l’âge de 20 ans et qui participa activement à la libération de Montpellier et aux combats de Montferrier à la tête de 200 hommes.
Avec beaucoup d’autres espagnols qui ont combattu pour la libération de Montpellier il y avait Juan Puig le père de Lina Angles notre porte drapeau puis aussi Jean Miras de Mauguio qui, très jeune, participa aux combats de la libération jusqu’à l’esplanade.
Merci encore monsieur le maire de Montpellier de perpétuer le nécessaire devoir de rappel historique.
Soyons dignes des valeurs de la résistance. Honneur et gloire à tous les résistants de toutes nationalités qui ont versé leur sang pour nos libertés.
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